L’exposition Pevarzek au Château de Tronjolly se révèle simple et décontractée, loin d’une tentative politique de relancer le régionalisme artistique. Il y a cent ans, le mouvement des Seiz Breur voulait réinventer une modernité bretonne contre le folklorisme, dans une période où l’esprit de révolution semblait bouleverser les arts, à force de constructivisme communiste, de cubisme, de celtisme païen ou de ferveur catholique. Conçue comme un hommage anniversaire, Pevarzek fait mesurer combien la bretonnité des arts échappe aux idéologies. Neuf artistes et artisans mettent leurs créations au service de ce jeune collectif, sous un manifeste qui se résume en « réfléchir l’image d’une Bretagne contemporaine dynamique, tolérante et ouverte aux autres cultures ». Malgré des affiches rappelant la pesante typographie Kornog, ces créations respirent l’envie de liberté. On y voit les ciels azurés de la peintre Anna Le Moine Gray, les motifs mégalithiques sur les assiettes du designer Owen Poho, les photos envoûtantes de forêts par Mathieu Le Guern (Krank Du), les robes et manteaux de Nolwenn Faligot [photo], les broderies fantasques de Nanou Valy ou celles, somptueuses, de Pascal Jaouen, les portraits colorés d’intérieurs ou de villages de René-Claude Migaud, les maisons individuelles de l’architecte Anaïs Nicolas, les méditations minérales du sculpteur Patrick Guého. Tous peuvent se revendiquer relais d’une tradition bretonne et chacun y retrouvera une partie de la sienne tout en discutant de la question posée lors du vernissage : « Qu’est-ce qui caractérise la création bretonne, qui la rend différente ? »