Plus d’un sera surpris par l’exposition « L’invention d’une histoire vraie », d’Eric Tabuchi et Nelly Monnier, au centre d’art Gwinzegal, à Guingamp. En lisant leur intention (photographier les 450 régions naturelles de l’Hexagone), on s’attend à une vision documentaire, certes un peu décalée, des paysages de Bretagne. En réalité, les deux artistes se livrent à une interprétation libre, un jeu d’imagination à partir d’éléments épars : ici des poteaux électriques envahis par du lierre, là une série de menhirs, un peu plus loin, les façades triangulaires, de Lézardrieux à Lorient. L’approche par les « régions naturelles » n’a donc rien à voir avec les « pays » traditionnel bretons. Et s’ils disent que leur regard est très lié à l’architecture, cela n’empêche pas de montrer les sculptures naturelles des roches de Plougasnou. Il y a de quoi être décontenancé. Cet agacement est un effet positif de l’exposition. Il conduit le visiteur à déplacer son propre regard sur son paysage quotidien. On peut contester les facéties d’Eric Tabuchi et Nelly Monnier, dire que ces deux-là ne connaissent pas la Bretagne. Dans ce cas, il faut aussi nous interroger sur ce déluge de photos que déversent des photographes amateurs bien bretons sur les réseaux sociaux. Des images souvent saturées de couleurs à l’affût du trait de côte remarquable, de la vague impressionnante, des images qui cachent le réel derrière le spectaculaire. L’invention d’une histoire vraie, Guingamp gwinzegal.com, jusqu’au 6 février. Entrée libre